La baignade, un dimanche après-midi à La Grenouillère Jules CORNILLIET (1830-1886)
1860, huile sur toile - 75 x 45 cm
Acquis aux enchères chez Millon, ce tableau est exceptionnel en raison de la rareté du sujet et de sa valeur historique. Son auteur, Jules Cornilliet ou Cornilliez (1830-1886), versaillais, élève du peintre romantique Ary Sheffer, puis de Horace Vernet, est connu comme peintre d’histoire, de genre et aquarelliste. Très bon paysagiste, il a également réalisé des aquarelles pour les costumes de théâtre et d’opéra. On lui connait même des peintures sur éventails en 1871. Il expose au Salon de Paris à partir de 1857.
Le sujet du tableau représente La Grenouillère, sur l'Île de Croissy-sur-Seine, célèbre guinguette, renommée pour ses bains froids et ses bals. Renoir et Monet peignent côte à côte en 1869 plusieurs vues du site, lieu de naissance de l’impressionnisme. Vers 1880, Maupassant s’y attarde souvent. Il évoque à plusieurs reprises ce lieu-dit dans ses nouvelles.
Au premier plan, un équipage de canotiers, portant tous le même accoutrement vestimentaire, débarque. Seul l’un d’entre eux tire l’embarcation aidé par un promeneur. À droite, un deuxième, désabusé, ne prête pas son concours, tandis qu’un troisième est endormi sur les bancs de nage près des avirons posés. Non loin, quelques baigneurs barbotent. Au cœur du site se trouve l’îlot de la Grenouillère. En son centre, un vieil arbre a perdu son faîte. Enfin la Seine poursuit son cours tranquille. L’horizon est clos par les collines de Bougival. Les arbres à droite occupent une surface très importante de la toile. Le format en hauteur est un parti pris original.
La technique de Jules Cornilliet est caractéristique des années 1860 : touches lisses pour le ciel et l’eau, petites touches empruntées à l’école de Barbizon pour les frondaisons. La palette chromatique se résume aux couleurs terre et vertes. Les rouges et les bleus sont employés pour les vêtements. La lumière est diffusée par de toutes petites tâches de jaune de Naples (canots, chapeaux de paille et baigneurs) ou des nuances claires.
Peint en 1860, le tableau montre un site encore bien naturel. Il existe une représentation du même sujet en 1864, en plus petit format (45 x 58 cm), en collection particulière. Un an plus tard, l’îlot, dit Le Camembert a été réaménagé. Des fascines en bois font office de cerclage sur le pourtour régulier et arrondi, le sol a été aplani, le vieil arbre remplacé par un jeune plant. Les vues peintes par Pierre-Auguste Renoir et Claude Monet montrent ces nouvelles dispositions.